POLITIQUE 0

La Maison Laurentine participe à cet événement avec une conférence / performance de Pierre Bongiovanni et I-Wei Li (Sidebysidestudio de Berlin).

Conférences / performances

  • Franco Bifo Berardi ;
  • Luc Boltanski ;
  • Roland Cayrol ;
  • Yves Citton ;
  • Ivana Dragsic ;
  • Dominic Gagnon ;
  • Sophie Gosselin et David G Bartoli ;
  • Jodi ;
  • Katharina Klotz ;
  • I-Wei Li et Pierre Bongiovanni ;
  • Matteo Lucchetti ;
  • Jean-Marc Manach ;
  • Anne Morelli ;
  • Antoni Muntadas et Marshall Reese ;
  • Fédéric Neyrat ;
  • Béatrice Rettig ;
  • Timothée Nay et Omnes ;
  • Efflam ;
  • Société Réaliste ;
  • Samon Takahashi ;
  • Tzuchien Tho ;
  • UBERMORGEN ;
  • Olivier Voirol ;
  • Paul Willemsen ;
  • Wunderlitzer :
  • Stream sur selfworld.net chambre #44 ;

Installations / vidéos / atelier / documentation de

  • Benoît Durandin et Alexandre Xanthakis ;
  • Dominic Gagnon ;
  • Harun Farocki et Andrei Ujica ;
  • Jodi ;
  • Jorge Luis Marzo et Arturo “Fito” Rodríguez ;
  • Ricardo Mbarkho ;
  • Antoni Muntadas et Marshall Reese ;
  • Société Réaliste ;
  • Le Dispositif (Pacôme Thiellement et Thomas Bertay) ;
  • Samon Takahashi ;
  • UBERMORGEN ;
  • sélection Argos : Charley Case, Tzu Nyen Ho, Gert Verhoeven ;

http://incident.net/theupgrade/politique0/

Politique Zéro est organisé par Upgrade ! Paris, les éditions MF et RYBN.ORG

la performance de I-Wei Li & Pierre Bongiovanni

vidéo du streaming réalisé par Ivan Chabanaud
(son correct, images de mauvaises qualité)
http://www.selfworld.net/
http://www.selfworld.net/chambre.swf?id=44

Jouir sans entraves

Vendredi 1 octobre 2010 à 23h

Lors de cette performance (en français et anglais) nous montrerons les liens qui relient les points cardinaux du contrôle social et politique qui s’exerce désormais sur tous et sur chacun. La police, la mafia, l’armée, les médias, constituent des entités cohérences, aux compétences complémentaires, notamment dans les domaines de la recherche, de l’innovation et de l’utilisation des technologies de communication électronique.

Nous montrerons également, à l’aide d’exemples concrets, réels ou inventés, comment les artistes et les opérateurs culturels sont devenus les puissants et complaisants complices de toutes les nouvelles forment de servitudes et de domination dont le capitalisme culturel a besoin pour jouir sans entraves.

Et pourquoi, nous les artistes, sommes les agents zélés et fiables par lequel le capitalisme peut désormais jouir sans entraves.

Nous le pouvons d’autant plus d’ailleurs que les horizons politiques se sont disqualifiés, effondrés les uns après les autres pour se transformer en attractions de foire, comme en témoigne d’ailleurs notre présence à cette tribune ce soir (le siège du PCF, place du Colonel Fabien, à Paris).

Et l’effondrement du politique ouvre enfin largement de nouvelles voies pour l’expérimentation et la recherche, car le monde est enfin débarrassé de tous les carcans, y compris de ceux de la morale et du droit.

Nous devons saisir ces opportunités parce que nous sommes artistes et que cela nous donne des responsabilités particulières : nous connaissons l’actualité, nous avons la conscience des mutations du monde, nous connaissons les enjeux et les challenges et surtout nous avons lu et compris les grands textes philosophiques, économiques, politiques, initiatiques, nous avons assimilé les grandes leçons artistiques des siècles précédents.

Nous le pouvons parce que nous sommes expérimentés et infatigables quand il s’agit de monnayer nos exigences avec les pouvoirs en place, et même si nous sommes prêts à vendre notre peau pour des clopinettes, nous clamons haut et fort les exigences de la création.

D’ailleurs nous ne sommes pas seuls, nous les artistes, à dire que nous avons un rôle essentiel à jouer pour l’édification des mondes futurs. Un économiste aussi célèbre, américain et respectable que Jéremy Rifkins ne dit rien d’autre quand il affirme que le déploiement du capitalisme culturel a besoin des artistes pour inventer les futurs marchés qui assureront sa croissance et sa splendeur.

Le capitalisme culturel, implique la production et la consommation de symboles ; il remplace progressivement les formes antérieures du capitalisme, le capitalisme industriel (qui implique la production et la consommation de stocks), comme le capitalisme financier (qui implique la production et la circulation continue de flux).

D’ailleurs ceci n’est pas nouveau. Ceux qui ont un peu de mémoire se rappelle sans doute qu’il y a encore quelques années 1970 la firme Rank Xerox, finançait à grand frais un laboratoire de recherche (le Xerox Palo Alto Research Center en Californie) au sein duquel artistes, ingénieurs et intellectuels pouvaient, chercher, expérimenter et innover en toute liberté, avec des budgets illimités. De ces années fécondes sont sorties les avancées les plus fécondes reprises et développées ensuite par le MIT de
Boston. Nouvelles applications, nouveaux produits, nouveaux marchés, nouveaux comportements, nouvelle civilisation pourrait-on dire, sont donc directement le fruit de ces noces fructueuses entre créatifs et capitalisme technologique.

Cette belle tradition perdure d’ailleurs aujourd’hui avec les étroites collaborations entre le DARPA (laboratoire de recherche de l’armée américaine) et les meilleurs équipes universitaires, lesquelles bénéficient ainsi d’énormes budgets de recherche pour travailler aux nouveaux chantiers de l’armée du futur : comment comprendre, contrôler et manipuler les émotions, comment imaginer des armes de destruction massive de nouvelle génération fonctionnant grâce aux nouvelles avancées nées de la compréhension des mécanismes du cerveau. Sciences cognitives et désir de domination permettront ainsi l’émergence de guerres informationnelles permettant de détruire le cerveau des peuples ennemis en les saturant d’informations jusqu’à ce qu’ils cèdent. Puisque si, grâce à la science, je sais comment fonctionne un cerveau, alors je sais aussi comment faire pour le détruire.

Sur le plan artistique on peut désormais créer, grâce aux connaissances de l’armée et des laboratoires de recherche universitaire, des oeuvres d’media bombes (par exemple des nuages informationnels se déplaçant au dessus des pays et des populations) agissant directement sur le mental et les émotions des populations. Cela ouvre des perspectives inouïes pour disséminer de façon parfaitement égalitaire les nouvelles formes de beauté.

Ce qui fut possible avec les bombes atomiques lâchées sur Hiroshima et Nagazaki (car, certains s’en souviennent peut-être, ces événements ont vraiment réellement existés) le sera aussi bientôt avec les mediabombes. Alors il est légitime que nous aussi les artistes puissions expérimenter et créer avec ces nouveaux outils.

Des artistes ambitieux qui ont su se hisser à la hauteur des enjeux de leur époque il y en a eu et il y en aura encore.Que l’on se rappelle par exemple la fantastique opération montée par le génial Orson Welles, lorsque à peine âgé de 23 ans (23 ans !!!), il annonce à la radio américaine, le 30 octobre 1938, une invasion d’extra-terrestres.

Il est vrai que nous attendons encore des actions artistiques de cette puissance dans le domaine des médias électroniques. Que l’on se rappelle aussi le rôle dramatique de « Radio mille collines » dans les massacres au Rwanda. Ce qui est possible pour le pire, devrait être également possible pour le meilleur, et le meilleur c’est nous les artistes qui l’avons en charge. A nous d’inventer des oeuvres d’art qui utilisent les technologies climatiques et médiatiques pour enchanter les territoires.

Les alliances fécondes entre armée et laboratoires universitaires devraient, naturellement et logiquement, si l’on suit les analyses de Jéremy Rifkins, se déployer maintenant par des alliances entre recherche militaire et expérimentation artistique. Cela nous permettrait d’accéder à des moyens nouveaux, à des connaissances nouvelles, cela permettrait également de rapprocher armée et population d’une part mais également art et population.

En introduction nous avons dit, en tant qu’artistes et créateurs, que nous devions, avec le soutien des médias, soutenir et accompagner les actions innovantes imaginées par la police, l’armée ou la mafia. Ces quatre systèmes de pouvoir et d’organisation ont en effet des caractéristiques communes :

  1. ils mobilisent de l’intelligence et de la connaissance ;
  2. ils promeuvent l’innovation et la recherche, car innovation et recherche assurent les conditions de leur survie ;
  3. ils sont des précurseurs en matière de veille technologique, et sont donc toujours parfaitement informés des évolutions, des innovations et des mutations ;
  4. ils sont également des précurseurs en matière de protection des données, de cryptage, de surveillance et de haking ;
  5. enfin ils ont une culture du secret qui leur permet de jouir de l’expérimentation en toute quiétude et à l’abri des menées des groupes de pression, des lobbys et de tous ceux dont la seule ambition semble être de vouloir retarder le progrès et l’innovation.

Ces systèmes de pouvoir constituent, d’une certaine manière, les matrices numérisées et exemplaires des stratégies de conquête et de domination du futur. Regardons maintenant ce qui se passe du côté de la police. Pour la police, comme pour les artistes d’ailleurs, la déferlante des réseaux sociaux constituent une des meilleures nouvelles de ces dernières décennies. Qu’il s’agisse de facebook ou de twitter nous disposons désormais de puissants outils d’observation, de compréhension et de contrôle des populations. Imaginons comment il devient possible désormais de mettre en place des systèmes de délation massive. C’est facile, gratuit, à la portée de toute personne disposant d’un accès internet et presque sans aucun risque.

Les inventeurs de l’internet (l’armée américaine) et du gps (l’armée américaine), du téléphone portable, nous ont donné des possibilités inconnues jusqu’à ce jour, d’organiser le traking des émotions, des gestes, des humeurs, de géo-localiser les mouvements d’opinion, de prévoir et d’anticiper les mouvements de foule, d’orienter le jugement, voire de convaincre avec élégance, de contraindre en douceur et d’asservir en commençant bien entendu par les « amis ».

Le règne de l’autosurveillance généralisée, c’est à dire de la vraie démocratie participative est enfin arrivé ; chacun, même le plus humble devient un prescripteur potentiel, un fournisseur de contenu, et chacun participe ainsi à sa manière à la réorganisation du monde sur des bases de transparence et de consumérisme informationnel. Ce que la consommation massive d’anxiolytiques chimiques n’a pas
réussi, ce que les somnifères télévisuels n’ont pas réussi, à savoir la domestication totale et définitive des individus, les réseaux sociaux font le réaliser. Essayons maintenant d’imaginer ce qu’un Orson Welles des réseaux sociaux pourrait inventer aujourd’hui !

Nous appellons de nos voeux des projets artistiques nouveaux, des audaces créatives nouvelles, des révolutions cybernétiques de grande ampleur, et pour se faire nous devons nous rapprocher des centres les mieux pourvus et les mieux informés, qu’il s’agisse de l’armée mais aussi de la police.

La police et les officines informatiques spécialisées savent déjà tout de nos états d’âme grâce aux palpeurs des courriers électroniques : imaginons ce que des artistes inventifs pourraient faire avec de telles trouvailles dans l’espace public comme dans la sphère privée !

Il y a quelques années déjà l’immense Jasper Johns, répondant à une question d’une critique d’art, pointait le rôle de la Mafia dans l’explosion des prix des oeuvres de l’art contemporain. D’autres artistes ont repéré cela et l’on aussi signalé (Picasso, Hans
Haake, etc). Nous connaissons le rôle du marché de l’art dans les dynamiques de
blanchiment de l’argent de la drogue. Nous connaissons les relations entre les milieux mafieux et les milieux artistiques. Outre qu’ils consomment les drogues fabriquées par les premiers, les seconds copient aussi leur mode d’organisation. Tout cela est ancien, connu et parfaitement respecté.

D’ailleurs des artistes proposent désormais d’aller encore plus loin. Le collectif international d’artiste connu sous le nom de ARTOUT propose désormais de généraliser les nouvelles techniques de prostitution de la mafia russe via internet (vous choisissez votre escort-artist sur le site web, vous payez en ligne de manière discrète et sécurisée, vous laissez vos commentaires sur les qualités et performances de l’escort-artist). Les artistes de ARTOUT, se propose à la location comme des escorts artistiques. Ces artistes d’avant-gardes ont déjà tout compris et, sans complexe, n’hésitent plus désormais à faire connaître leurs travaux et à gagner leur vie en adoptant les modèles de la prostitution mafieuse. Ils ouvrent ainsi
la voie à de nouvelles avancées pour la production artistique et la diffusion des oeuvres.

Cette question de la prostitution des artistes a commencé en douceur avec les serveurs vidéo qui connaissent un succès foudroyant et deviennent des enjeux économiques colossaux : les artistes rejoignent massivement ces réseaux pour diffuser leurs films en acceptant de perdre pour cela la totalité de leurs droits moraux et artistiques. Cette nouvelle et moderne posture de l’artiste qui devient ainsi fournisseur bénévole de contenus au bénéfice des entreprises qui les diffusent.

Les mauvais coucheurs diront que le souci de notoriété passagère l’emporte sur celui de l’intégrité des oeuvres et que les artistes qui acceptent cela acceptent du coup que leurs travaux entrent dans la grand flux des datas dans lequel ils se perdent et se noient de façon indifférenciée. Foutaises.

D’ailleurs la morale de l’histoire est délivrée par la multinationale de l’art Guggenheim (New-York, Venise, Bilbao, Berlin, Abu Dhabi) avec sa biennale résultant d’un accord avec « YouTube », « HP » et « intel » pour l’organisation de la Biennale de la création vidéo.

Une biennale d’art dans laquelle sont diffusées des oeuvres pour lesquelles les droits n’appartiennent plus aux artistes, réglant ainsi définitivement les questions désuètes et déplacées des droits d’auteur et de la propriété artistique.

Il nous resterait à étudier maintenant le rôle des medias, mais le temps manque.

Aussi nous vous proposons de terminer par une proposition d’action collective et réjouissante : une « standing ovation » dédiée au capitalisme culturel afin qu’il puisse, en tous temps et en tous lieux, se déployer et jouir sans entraves et pour célébrer ensemble les noces nouvelles entre les artistes la police, l’armée, la mafia et les medias.

Voici le manifeste de la standing ovation :

  • étant donnée la disparition des partis politiques ;
  • étant donnée la disparition de la lutte de classes ;
  • étant donnée la dissolution des radicalités artistiques dans la sphère du divertissement ;
  • étant donnée l’obsolescence des formes d’action collective ;
  • étant donnée la disqualification de toutes les théories passées et en cours ;
  • étant donné l’omniprésence du cynisme sentimental et de son contraire, la mièvrerie romantique ;
  • étant donné la fin des grands récits et de leurs utopies ;
  • étant donné la domination du nihilisme ;
  • étant donné l’absence de pensée philosophique ;
  • étant donné l’absence de pensée tout court ;
  • étant donné l’unique quête du profit à tout prix ;
  • étant donné la victoire chaque jour plus totale du fétichisme de la marchandise ;
  • étant donné la compassion infinie que nous entretenons avec nos propres tourments ;
  • étant la bêtise, et son corollaire : l’arrogance, des contremaîtres de la création artistique ;

Nous affirmons qu’il reste une forme encore provisoirement possible d’intervention dans l’espace public, d’initiative totalement individuelle qui consiste à manifester, sobrement, son accord ou son désaccord, ce qui est exactement la même chose, avec tel ou tel événement de l’actualité, tel ou tel comportement des hommes politiques, telle ou telle décision de l’administration, tel ou tel fait de communication, de culture ou d’art, en se rendant sur le lieu symbolique de cet événement avec
pour tout appareillage un petit banc d’environ 30 cm de hauteur sur lequel une seule personne peut se hisser pour se livrer à la Standing Ovation.

La Standing Ovation est un geste discret, radical, peu gourmand en logistique, pouvant se pratiquer n’importe ou, et auquel peuvent se rallier une, dix, cent ou mille personnes.

La Standing Ovation ne procède pas par mots d’ordre, aucun slogan n’est clamé, aucune analyse n’est proposée, aucune direction n’est indiquée, aucun objectif n’est défini.

La Standing Ovation est une forme de désespérance joyeuse, peu bruyante, peu contraignante, qui échappe à toute forme de contrôle, de récupération, de détournement, de répression.

La Standing Ovation, et ce n’est pas sa moindre qualité, n’ a par ailleurs aucune chance de se prévaloir d’une forme quelconque d’efficacité.

La Standing Ovation est un geste moderne, mais de cela aussi on s’en fout.

Quelques recommandations pour pratiquer la Standing Ovation :

  • une tenue ordinaire, ni élégante, ni négligée, ni excentrique ;
  • une posture humble, sereine, sans passion, sans ardeur ;
  • on sera attentif à l’environnement autour de soi mais sans affectation ;
  • les applaudissements, pratiqués de façon conventionnelle, régulièrement sans précipitation pourront avoir une durée de 3mn ou plus ;
  • à la question "que faite-vous là ?", on répondra simplement :
    "j’applaudis", par exemple la politique du Ministère de la Culture,
    l’oeuvre de Jeff Koons, ou tout autre événement sans importance.

Qui ?

Pierre Bongiovanni

Responsable artistique de la Maison Laurentine, commissaire d’exposition ("Sculptures en l’Ile" à Andrésy dans les Yvelines, "schizophrenia Taiwan" à Linz, Saint Pétersbourg, Berlin, Paris, Londres, Marseille, Dresde), auteur, photographe, myope, vierge ascendant taureau.
cv : (...)

I-Wei Li

Artiste multimédia et curatrice
Directrice artistique de SideBySideStudio
Berlin / Allemagne

Quand ?

Entrée libre.

Horaires d’ouverture :

  • vendredi 1 : 18h-minuit
  • samedi 2 : 10h-minuit
  • dimanche 3 : 10h-20h

M° Colonel Fabien

Espace Niemeyer, Paris
2, Place du Colonel Fabien
75019 Paris
France

Où ?

Espace Niemeyer - siège du Parti Communiste Français

N 48° 52.697 - E 2° 22.240
2 Place du Colonel Fabien
75010 Paris
Île-de-France
France